Le bilan

DSC_0117lightBon, voilà, ça fait trois semaines que je suis rentrée en France. Il est temps de faire un petit bilan sur ce blog avant de le laisser vivre sa vie seul sur l’Internet (autrement dit de ne plus m’en occuper, car maintenant c’est à Nantes que je suis).

Voilà donc un
PETIT BILAN DE MON SEMESTRE À MELBOURNE

1 – Étudier

Mon semestre à l’université de Swinburne s’est super bien passé. Bon, le côté administratif n’a pas toujours été simple (surtout au début) mais à côté de l’administration française ça reste gérable. Je suivais 4 cours différents : interaction design for web (webdesign), advertising design, interface and information design et research and development project. Tous ces sujets m’ont vraiment intéressée même si je n’ai pas appris énormément de choses techniques (sauf pour le cours d’advertising design qui était très nouveau pour moi). Les nouveautés se sont plus fait sentir du côté de la manière de travailler et surtout de la vision des designers australiens qui est assez différente de celle des designers français. En France (et en Europe globalement), on se base pas mal sur l’école suisse-allemande, l’héritage du Bahaus, le minimalisme, « less is more ». Les Australiens, eux, sont plus attirés par les couleurs pétantes, les contrastes marqués, les typographies grasses qui prennent bien la place et globalement des choses un peu moins sérieuses et beaucoup plus pop. C’est un autre point de vue ! Du coup j’ai dû m’adapter et ça m’a permit d’élargir mes horizons et de tester de nouvelles choses.

DSC_0001+ DSC_0012+ DSC_0006+ DSC_0009+ DSC_0003+Côté résultats ça s’est bien passé également, je n’ai eu que des HD ce qui signifie High Distinction (c’est la meilleure note qui correspond à + de 80 % de réussite).

2014-12-21 16_21_48-CHARLOTTE SFERRUZZA - Outlook Web App

Petite capture d’écran pour me la péter


// Petite parenthèse « Concours »

Je parlais ici de l’application que je développais avec 2 amis allemands. L’application s’appelle Grocery Guard et permet de scanner les codes-barres des produits de supermarché/épicerie et de montrer les données relatives au produit (traçabilité) visuellement au consommateur. Nous avons fini de développer un premier prototype que nous avons présenté lors d’un concours de développement d’applications mobiles organisé par Samsung et Swinburne. Pour résumer, le concept de l’application venait de Marc Seifert (qui a géré le business plan). Lino Capobianco (programmeur) a décidé de développer cette application avec mon aide pour le design et la communication globale.

Et nous avons gagné le premier prix !

(le prix étant une bourse d’étude de beaucoup d’argent valable uniquement en Australie, nous avons donc gagné ce prix uniquement pour la gloire et pour avoir la classe auprès de Samsung, car aucun d’entre nous ne va pouvoir rester étudier en Australie)

Voilà à quoi ressemble l’application :

2014-12-21 16_24_24-wireframe2.0.pdf - [wireframe2.0] - SumatraPDF2014-12-21 16_23_23-wireframe_examples.ai @ 25% (CMJN_Aperçu)2 – Travailler

À côté des études j’ai eu l’occasion de rencontrer quelques personnes sympa avec qui bosser. Notamment un photographe pour qui j’ai travaillé en tant que modèle sur 2 shootings et un clip vidéo, ce qui ne m’a pas fait gagné énormément d’argent, mais ce fut une expérience très intéressante. Et en plus avec cette petite équipe j’ai pu découvrir de chouettes lieux que je ne connaissais pas dans la ville.

J’ai également prêché ma paroisse en parlant de mon association Expolaroid (avec laquelle nous promouvons la photographie instantanée et organisons des expositions à travers le monde) de-ci de-là, et comme nous n’avions pas de contacts australiens, mes collègues expolaroidiens français m’avaient aiguillée vers une petite entreprise qui revend des pellicules Polaroid s’appelant FilmNeverDie. Et comme le monde est tout petit, le photographe pour qui j’avais bossé connaissait également les gars de FilmNeverDie chez qui il se fournissait en pellicules. Bref, nous avons conclu un accord et FilmNeverDie va organiser sa propre exposition à Melbourne pour Avril 2015, la troisième édition d’Expolaroid. Et ça c’est chouette !

2014-11-27 20.13.31 2014-11-28 15_57_47-FilmNeverDie.com
3 – Vivre

La vie à Melbourne est douce, très douce. Après avoir passé un hiver assez froid (aussi froid qu’à Nantes), j’ai pu profiter d’un chouette printemps aux températures chaudes-mais-pas-trop-chaudes. Je suis tombée folle amoureuse de cette ville dynamique et passionnante à l’architecture incroyable. Ce n’est pas la capitale culturelle australienne pour rien : il y a toujours quelque chose à faire ou à voir, et même s’ennuyer à Melbourne reste exquis. Ville, plage, campagne, paysages somptueux ou ville nocturne cool, tout est proche et accessible (ce message était sponsorisé par tous les guides de voyages aux jolies photos).

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4 – Voyager

Entre les cours et le travail perso, j’ai pu découvrir quelques coins sympa de l’Australie. J’ai découvert la super ville de Sydney pendant mon spring break, la Great Ocean Road et les Grampians le temps d’un long week-end, la Tasmanie pendant mes vacances, et pleins de supers plages lors de beaux dimanches ensoleillés. L’Australie regorge de merveilles dont je n’ai vu qu’une toute petite partie, mais je ne m’attendais pas à autant de diversité !

DSC_1621 DSC_0269 DSC_0224 DSC_0229 DSC_0185 DSC_0171Pour conclure, cette expérience à l’étranger fut vraiment incroyable pour moi. C’était la première fois que je partais aussi loin et aussi longtemps (4 mois et demi). Je m’attendais évidemment à vivre de beaux moments, mais j’appréhendais un peu la solitude ou les galères matérielles. Au final tout s’est tellement bien passé que je n’en reviens encore pas ! J’ai fait de superbes rencontres et vécus des moments incroyables. J’ai appris des tas de choses sur la culture australienne, sur le design, sur les gens. J’ai été un peu hors de ma zone de confort, et ça fait du bien !

Memefest

Je suis rentrée en France depuis deux semaines maintenant. L’acclimatation au froid nantais n’est pas simple, mais heureusement que la raclette existe. J’ai comme plan diabolique d’écrire un petit article de conclusion/bilan de mon expérience en Australie, mais pour l’instant j’ai une autre histoire en tête !

Une semaine avant mon retour en France (il y a donc 3 semaines si tu es attentif – et tu l’es, je le sais) j’ai participé à un workshop (un atelier/séminaire/congrès) organisé à l’université par mon prof d’advertising design Oliver Vodeb, docteur dans le domaine du design et de la communication. Dès le début du semestre je m’étais assez bien entendue avec lui et il avait aimé mon ouverture d’esprit « européenne » (lui aussi est Européen, il vient de Solévie) qui selon lui se détachait de la façon de penser de la plupart des étudiants australiens qui restent facilement « dans les clous » d’un brief et attendent qu’on leur dise quoi faire. Bref, il aimait bien ce que je faisais et il m’a invitée à participer à l’événement organisé par son association Memefest : festival of socially responsive communication and art (que je traduirai par : « festival de l’art et de la communication qui ont une portée sociale »).

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La semaine fut séparée en deux temps : 3 jours de conférences et 5 jours de workshop. Des penseurs, designers, académiques, étudiants, artistes de pleins de pays étaient invités (Allemagne, Canada, Serbie, USA…) pour s’exprimer sur le sujet suivant : « Radical Intimacies : dialogue in our times ». C’est le sujet sur lequel j’avais bossé au début du semestre, mais il a été contextualisé pour qu’on puisse produire quelque chose de concret. Le but du workshop était donc de travailler avec une communauté Aborigène australienne (venant de la région du New South Wales) autour du dialogue entre les peuples indigènes, le gouvernement Australien et les Australiens.

memefest_02memefest_12memefest_11amemefest_13memefest_14memefest_15memefest_17Nous avons travaillé en groupes d’environ 10 personnes. Oliver m’a fait intégrer son équipe où je me suis retrouvée entourée de gens vraiment motivés dont les compétences se complétaient très bien, ce qui était cool pour bosser. On a chacun trouvé notre place au sein du groupe et en très peu de temps chacun savait ce qu’il avait à faire. Chaque équipe bénéficiait de la présence d’une personne de la communauté Aborigène avec qui on pouvait discuter et échanger. C’est ainsi que j’ai rencontré Auntie Hazel, une grand-mère Aborigène qui a fondé l’association Grandmothers Against Removals (GMAR) en janvier 2014. Au tout début du workshop, elle nous a raconté son histoire et son combat contre les « Stolen Generations » (générations volées). Plus d’infos ici si ça vous intéresse : http://fr.wikipedia.org/wiki/G%C3%A9n%C3%A9rations_vol%C3%A9es

memefest_06Des excuses publiques par le gouvernement Australien ont été prononcées en 2008, mais encore aujourd’hui, des milliers d’enfants aborigènes sont enlevés à leurs parents pour les mauvaises raisons.

Écouter son histoire a sans doute été un des moments les plus forts que j’ai vécu ici en Australie. On a tous fini en larmes. A l’unanimité, nous avons décider de nous inspirer de ce témoignage poignant pour construire une campagne de sensibilisation à ces « Children Removals » dont la plupart des Australiens ignorent l’existence depuis les excuses du gouvernement, pensant que cela appartient au passé.

memefest_22Nous avons filmé et retranscrit le témoignage de Hazel pour l’exploiter dans notre campagne. Nous avons utilisé ses citations pour créer des posters (ça c’était mon job) et avons créé un site web rassemblant différents supports de créations (témoignages audio, vidéos, visuels) que nous mettons à dispositions d’artistes et d’activistes pour qu’ils répandent le mot et sensibilisent à leur tour.

memefest_20memefest_21Nous avons basé notre travail sur cette phrase d’Auntie Hazel : « We whisper to our children « Come home » = « Nous murmurons à nos enfants « Rentre à la maison » ». Quand les parents se voient retirer la garde de leur enfant du jour au lendemain, ils n’ont droit qu’à quelques heures de visites par mois. Ces visites étant supervisées, ils ne peuvent pas parler librement à leurs enfants et s’ils leur expriment une idée sensible (comme « Rentre à la maison »), ils peuvent se faire retirer leur droit de visite pour toujours. Nous avons donc créé ce site web whisper.org.au, intitulé « Maayali », qui est un terme Aborigène voulant dire « murmurer ». Le témoignage complet d’Hazel est disponible sur le site pour recontextualiser les citations que nous avons utilisé pour la campagne.

Pour ma part, aidée de Hugues, étudiant en design de publicité et d’Oliver, j’ai créé 4 posters autour d’images et de textes dénonçant ces enlèvements d’enfants que nous avons placardés dans les rues de Melbourne.

poster1poster2poster3poster4Ce fut une expérience inédite pour moi. Je n’avais jamais été aussi impliquée émotionnellement dans un projet de design et le fait de travailler main dans la main pour aider des personnes qui en ont vraiment besoin est quelque chose d’incroyable. J’ai pu voir des membres de la communauté Aborigène pleurer devant mes posters en disant que ça leur a redonné espoir et nous remercier dès que nous croisions leurs regards. Je peux vous dire que je n’en menait pas large… Mais pouvoir utiliser un des seuls trucs que je sais faire pour aider ceux qui en ont besoin fut quelque chose d’énorme pour moi.

J’ai énormément appris sur l’histoire et la culture australienne ce qui m’a permis de clôturer mon expérience en Australie sur une belle note.

memefest_19 memefest_24 memefest_25 memefest_26 memefest_28  memefest_30 memefest_31 memefest_32 memefest_33 memefest_34 memefest_35 memefest_36Toutes les photos ont été prises par Rok Klemencic, Michelle Gunther et Kevin de LOKI Design. Allez d’ailleurs lire son bel article (en anglais) : http://2356.lokidesign.net/2014/12/memefest-2014-radical-intimacies-recap/